Agriculteurs urbains, les « hors-case »

Livre des Sourciers Hydroponie - maquette des dessins du livre

Ça va vous faire rire, mais je me prends un peu pour une agricultrice urbaine. 🤪

Ironique depuis mon sublime Gers rural ? Agricultrice de par mon métier, je me sens proche des agriculteurs urbains parce que je rencontre les mêmes difficultés qu’eux, à savoir que je suis en dehors des normes. Dans le monde agricole, on ne sait pas dans quelle case m’inscrire. 

Ce qui bloque ? La taille de ma microferme (600m2 !) et mon mode de culture : l’hydroponie. Cultiver des plantes dans l’eau est très adapté pour faire pousser des plantes en ville, là où il n’y a pas de terre, mais ce n’est certainement pas chose courante par ici.

On en arrive au point de l’histoire où vous vous demandez : « mais alors Marion pourquoi diantre fais-tu du hors-sol dans le Gers, si tu dis toi-même que ça n’a pas de sens ?! ». Et comme c’est une longue histoire, mais pas du tout le sujet de ce billet, si cette question vous tiraille vous pouvez assouvir votre curiosité ici

MARION

A quoi ça sert l’Agriculture Urbaine ? 🙃

Chez Les Sourciers, environs 30% des personnes qui viennent se former sur notre ferme hydroponique ont comme projet de s’installer en ville. En les accompagnant je me retrouve dans leurs histoires et leurs valeurs.

Les agriculteurs urbains font débat. C’est peut être parce ce qu’ils font les choses différemment ? Ils veulent souvent donner de leur énergie pour marquer positivement leur passage ici, rendre leur monde un petit peu meilleur. Et une des choses que fait l’agriculteur urbain, c’est de contribuer à rendre la ville plus agréable pour ses habitants. Ce n’est vraiment pas chose facile, alors il faut être créatif, innovant, et surtout tenace ! On les prend souvent pour des doux rêveurs. Alors oui, ça commence souvent par une vision idéaliste, mais ceux qui réussissent à s’installer en ville ont remporté les douze travaux d’Hercule administro-technico-économico-politique alors respect.

D’autant que les critiques et les moqueries vont de bon train. (Je me suis toujours demandé pourquoi essayer de freiner quelqu’un qui va dans une belle direction ? À qui profitent les moqueries ? Ou peut-être que c’est moi qui n’ai pas d’humour ? Je vois quelqu’un qui a le feu d’idées dans les yeux, j’ai juste envie d’y jeter des brindilles pour voir où ça va, certainement faire de la fumée pour divertir les lecteurs.) Bref, c’est peut-être décalé de faire des champignons dans les anciens parkings ou du safran sur les toitures, mais c’est génial d’essayer de nouvelles pratiques non ? Les médias n’ont pas aidé à l’émergence de l’agriculture urbaine en martelant que « Celle-ci ne pourrait pas nourrir la ville ». Euh… Il n’a jamais été question que quelques potagers nourrissent les villes. Il n’a jamais été question de remplacer les agricultures traditionnelles, rurales, dont nous dépendons tous ! Les missions que se donnent les agriculteurs urbains sont autres, et préparez-vous parce qu’elles sont multiples. Il peut s’agir de pédagogie, de sensibilisation, de recyclage, de lien social, de recherche, de biodiversité, d’alimentation, de bien être, ou d’innovation. Il y a une diversité sur les modes de production, mais aussi sur les profils ainsi que sur les modèles économiques. 

Une chose qui me blesse énormément, c’est la vision fausse du monde agricole depuis ceux qui n’y sont pas (ruraux ou urbain) qui entraine de l’agribashing, des critiques violentes et souvent infondées. C’est tellement dommage !  Alors une des choses que permet de faire l’agriculture urbaine, c’est de sensibiliser le grand public au vivant : aux plantes et au travail que c’est de faire pousser quelque chose ou élever un animal. Certes ça ne leur fait pas passer un diplôme agricole, mais la pédagogie est un premier pas. Elle peut déclencher des vocations (parfois) et ouvre les esprits (souvent). C’est fascinant et à mes yeux très complémentaire de l’agriculture rurale. Je suis très heureuse et privilégiée de côtoyer ces deux facettes que j’admire énormément.

L’Association Française d’Agriculture Urbaine Professionnelle (AFAUP)

Il y a quelques années, j’ai eu la chance de cofonder l’AFAUP . Une association qui fédère les agriculteurs urbains, qui les accompagne en les mettant en réseau (beaucoup), qui les protège et les chouchoute (un peu), pour en favoriser le déploiement. Pour moi il était très important que l’agriculture urbaine reste aux mains des porteurs de projets et ne devienne pas un objet de greenwashing. Aujourd’hui nos membres sont forts, solidaires et organisés, alors je n’ai plus cette préoccupation. J’ai vu de tout petits projets avec d’énormes impacts. J’ai vu des passionnés franchir le pas et après quelques années à se chercher en ville, déménager à la campagne pour s’installer en agriculture. 

Monter une asso de rien et la voir grandir chaque jour un peu plus pour devenir ce qu’elle est aujourd’hui est une aventure incroyable. Moi qui n’avais pas vraiment d’expérience associative, me voilà servie ! Le pouvoir de la mise en réseau est fabuleux, on se retrouve autour de valeurs communes, on soulève des problèmes communs, et on devient ainsi plus forts pour les résoudre. Ça colle complètement avec mon projet de vie : apprendre et transmettre.

On a d’ailleurs filmé une vidéo sur cette belle asso il y a quelques années :

L’AFAUP propose des évènements et des ressources ouvertes à tous. Par exemple, dans le but de pérenniser les nouvelles installations urbaines et émergentes, on a réalisé un travail d’enquête dont le résultat est public, ici. 

J’avais envie aujourd’hui de vous en parler un peu parce que ce blog c’est mon petit espace et j’aime aborder tout type de sujets #free. Mes petits commentaires en italique parce que je peux pas m’empêcher de commenter mon propre texte. Ça part en live I know.

Qu’est-ce qui freine le développement de l’agriculture urbaine ?

Enquête juridique de l’AFAUP 🔦

((Contexte : Les porteurs de projets se voient confrontés à des difficultés juridiques qui freinent leur développement.

Objectifs de l’enquête : Obtenir des données représentatives. Comprendre les difficultés et imaginer des propositions. Données à transmettre aux autres organismes accompagnateurs pour leur information (chambre agri, adear, gab …).

 

Echantillon de l’enquête :

– 50% ont moins de 40 ans (ouf)
– 70% non issus du monde agri (wow)
– 100% vendent en circuits courts (yeah!)
– 75% cultivent sur moins de 1 Ha (#microferme)
– 3 profils se dégagent : Producteurs, Multis et Amateurs

Les points de blocage des agriculteurs urbains 🔧

FONCIER

Résultat : Situation non sécurisée. 60% des répondants contractent des conventions d’occupation précaires ou des prêts à usages. Oulala c’est chaud…

PROTECTION SOCIALE

Résultat : 25% des répondants ne sont pas affiliés à la MSA (la sécu du monde agricole). C’est regrettable d’être agriculteur sans passer par la MSA. 

Cause :
– Critère d’affiliation à la MSA lié à la superficie est rarement rempli ;
– Les porteurs de projets sont mal informés ou bien préfèrent rester au régime général.

Conséquence : Selon l’état actuel de la législation, ils ne peuvent prétendre à un véritable statut social et sont dénués de toute couverture sociale dès lors qu’ils n’exercent pas. Oups ça craint.

Action à mener : Une meilleure information et compréhension du nouveau système d’affiliation par les acteurs des nouvelles formes d’agriculture et les chargés d’accompagnement s’imposent

ACCOMPAGNEMENT

Résultats :
– beaucoup de porteur de projets se sentaient incompris par les institutions agricoles.
I feel you.
– face à ses projets innovant les institutions agricoles ne disposent pas encore des bons outils  pour les orienter (exemple : exploitations aquaponiques)

Alors comment faciliter les futures installations ? 🌱

Quelques pistes de réflexion suite à l’enquête …

  • Les critères d’affiliation à la MSA liés à la surface méritent-ils d’être révisés ?
  • Le CDOA pourrait jouer un rôle plus important dans l’attribution du foncier à partir d’une certaine surface et pour ceux qui n’ont pas la capacité d’exploiter.
  • En ville, le bail rural devrait s’appliquer de droit à certains projets.
  • Nous préconisons l’inscription dans les SCOT et/ou PLUs pour les sites d’agricultures urbaines à vocation sociale sous la dénomination « sites agricoles d’utilité publique ».

Retrouvez l’enquête complète et plein d’autres ressources sur les sujets d’agriculture urbaine ici.

Belle fin de journée.

BESITOS

… et petit dernier lien 

Si vous aimez la nature en ville mais que vous n’êtes pas non plus chaud patate pour monter une serre sur le toit de votre copropriété, vous pouvez tout à fait commencer par faire des mini-actions de reverdissement de votre ville. Ophélie Ta Mère Nature sur youtube, la Queen de la guérilla green vous propose des tutos en vidéo aussi désopilants qu’instructifs. Oui j’ai utilisé le mot désopilant.

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